La reprise selon Tours Chanteclerc : «Le client oubliera vite!»

Dossier spécial. Pour l’ensemble de l’industrie, la reprise risque de se faire selon la nature des produits offerts et des spécialités de chacun. C’est ce que croit le voyagiste.

« Pour un grossiste comme Tours Chanteclerc, dont la grosse partie de son chiffre d’affaires est en Europe, il faut bien s’entendre qu’on ne compte pas grand-chose avant 2022. Si jamais on réussit à faire partir quelque-chose en septembre ou octobre 2021, on sera contents, explique Claude St-Pierre, directeur général du voyagiste.

« C’est clair qu’une entreprise axée sur le Sud aura plus de chance de repartir en 2021, compte tenu notamment des coûts, qui sont complètement différents. Pour les voyagistes Sud, il y aura certainement une belle reprise plus tard cette année.

« En ce qui concerne Tours Chanteclerc, cette reprise Sud sera un facteur à étudier pour nous : les produits Sud redonneront confiance aux voyageurs, et nous qui proposons des voyages limitrophes, nous pourrons éventuellement bénéficier de cette reprise, pour 2022, en espérant qu’on obtienne bien entendu cette immunité souhaitée. »

Le dollar touristique disponible, mais très sollicité

Tours Chanteclerc émet toutefois une réserve quant à la rapidité de la reprise des voyages.

« Le dollar touristique qui n’est pas encore dépensé par le consommateur, est en train de se faire solliciter par un paquet de raisonnements : changer la piscine, aller aux Îles de la Madeleine ou encore acheter un chalet, soulève Monsieur St-Pierre.

« Ce dollar touristique est dans le processus de se faire dépenser. Donc, même si les frontières des autres continents rouvrent en cours d’année 2021, ce dollar touristique risque de ne plus être disponible. C’est pourquoi 2021 n’offre rien de certain pour Tours Chanteclerc. Mais nous avons les reins solides pour attendre cette reprise. »

Claude St-Pierre, directeur général de Tours Chanteclerc

S’inspirer du passé pour prédire l’avenir

On peut virer, soupeser, démystifier le client dans tous les sens pour tenter de prédire comment il va réagir. On peut aussi se souvenir comment les choses se sont passées, un certain 11 septembre pas si lointain.

« Le dernier gros événement qui a fait en sorte qu’on s’est vraiment arrêtés sérieusement, c’est le fameux 11 septembre 2001. On cherchait tous dans la série des livres jaunes « Attentats terroristes pour les nuls »! Actuellement, on cherche tous le livre « Les pandémies pour les nuls »! lance Claude St-Pierre.

« Mais souvenons-nous : les premiers jours après le 11 septembre, on se disait tous que l’industrie allait prendre deux ans avant de s’en remettre, parce qu’il venait de se produire un acte incroyable. Et pour cause : il y avait une conséquence énorme, celle de la fermeture du ciel aérien mondial! Et ça, c’était une première.

« Aujourd’hui, on vit une autre première : la pandémie. Et elle est mondiale aussi. Arrive donc la question : quand va-t-on retomber sur nos pattes?

« Après le 11 septembre, le voyage a finalement repris 4 mois après, et l’industrie a vite même dépassé la vitesse d’avant le 11 septembre. J’ai l’impression que ce phénomène pourrait aussi se produire prochainement » pense Monsieur St-Pierre.

Les signes qui permettent d’envisager les choses ainsi

« La reprise pourrait se produire rapidement notamment pour cette raison : beaucoup de gens ont atteint un âge certain et se disent : « ok, ce sera le moment où jamais de voyager, parce que nous vieillissons. Si on veut faire ce voyage-là, c’est le moment ».

L’exemple des croisières

Monsieur St-Pierre attire également l’attention sur les croisières. « En février 2020, je comptais parmi ceux qui disaient ouf!, les croisières ne vont pas s’en remettre avant longtemps, parce qu’elles nageaient tellement dans les publicités négatives. Souvenons-nous de ces Québécois pris à l’autre bout du monde, enfermés dans leur cabine, où personne ne leur parlait.

« Et aujourd’hui, qui est en train de se relever les premiers? Les croisières! Je me dis : on oublie vite! Et j’ai l’impression que ce contexte sera général, à l’ensemble du tourisme.

« Certains évoquent 2, 3 ou 4 ans avant qu’on retrouve le seuil passager aérien qu’on avait avant la pandémie. Je ne dis pas qu’ils ont tort, mais je vois beaucoup plus de soleil, à plus court terme, à l’horizon.

« Car dans un sens, nous sommes aujourd’hui à l’étape de déterminer ceci : trouver le mécanisme pour laisser entrer un Canadien en Italie et laisser entrer un Italien au Canada, pour que tout le monde se sente protégé. »

Ce qu’on appelle dans le nouveau jargon : les bulles.

Une reprise peut être rapide, mais sous le signe de la conscientisation

Claude St-Pierre reconnait que les choses vont changer : « un épidémiologiste faisait remarquer qu’il était incompréhensible de laisser rentrer les gens dans une épicerie, circuler librement et tâter tous les produits dans un contexte où le virus existe. Je pense que cette conscientisation va s’installer. »

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Détentrice d’un baccalauréat en journalisme de l’Université Laval, Isabelle débute sa carrière de journaliste en voyage en 1995. Ses articles et reportages ont voyagé dans les magazines L’agent de voyages, Voyager et Tourisme Plus, Atmosphère d’Air Transat et le Journal Le Devoir, entre autres. Elle est co-autrice de quatre guides chez Rudel Médias (25 destinations soleil pour les vacances) et aux Éditions Ulysse (Voyager avec des enfants, Fabuleux Alaska/Yukon, Longs séjours à l’étranger). Depuis 2006 aussi, elle présente des conférences devant public.