Transfert des vols Sud de Mtl-YUL vers St-Hubert-YHU : impossible?

L’idée avancée par Mehran Ebrahimi, directeur de l’Observatoire de l’aéronautique et de l’aviation civile, de transférer les vols qui vont vers le Sud et les low costs de l’aéroport de Montréal-YUL vers l’aéroport MET de St-Hubert-YHU, pour désengorger YUL, est-ce un projet impossible?

Photos: Isabelle Chagnon/MET

Ou du moins, pour un bon bout de temps?

Comme vous avez été nombreux à nous signaler votre intérêt pour le sujet, Open Jaw Québec a continué de faire des recherches. Et voici :

« En vertu de son bail avec Transports Canada, Aéroports de Montréal (ADM) – l’exploitant de Montréal-Trudeau et de Mirabel – bénéficie toujours d’une clause d’exclusivité pour les vols internationaux. » avait déniché La Presse en février 2023.

Transports Canada a intérêt qu’ADM roule plein fuel

Dans la section Gouvernance et transparence du site Internet d’ADM, on peut lire que la société « Aéroports de Montréal est liée à Transports Canada par un bail à long terme qui précise ses obligations et certains aspects de son fonctionnement.  En plus de respecter la réglementation en vigueur, ADM est tenue de verser un loyer à Transports Canada, lequel représente un pourcentage des revenus bruts de la Société. »

En d’autres mots, pour garantir ses bons revenus, Transports Canada pourrait-il jouer d’influence pour éviter que les transporteurs aériens Sud et low costs délaissent YUL?

Nous n’avons pu obtenir quelconque information similaire, en termes d’engagements finauciers, du côté de St-Hubert.

ADM rappelle l’épisode Mirabel

Dans un rapport émanant d’une consultation publique menée au printemps 2022 par le député bloquiste de Longueuil–Saint-Hubert, Denis Trudel, sur le développement de l’aéroport de Saint-Hubert – rapport que La Presse avait consulté, le média rapportait la réaction d’ADM à propos du plan d’affaires du MET (grosso modo une grande expansion de ses activités) :

« Permettre une plus grande dilution (diminuer la concentration à YUL, NDLR), c’est risquer de recréer l’histoire de Dorval et de Mirabel qui a mené Montréal à sa marginalisation comme destination ; elle, la capitale mondiale de l’aviation civile » avait pu lire La Presse dans le document ainsi que dans un mémoire déposé par ADM.

Du côté de l’aéroport MET de St-Hubert-YHU

Open Jaw Québec a demandé une rencontre avec l’administration du MET, dans le but d’obtenir leur point de vue sur l’idée, l’intérêt et la faisabilité du transfert des vols Sud de YUL vers YHU, et a essuyé un refus.

On nous a uniquement partagé cette déclaration, par courriel, signée Yanic Roy, PDG du MET :

« Le projet de développement du MET – Aéroport métropolitain de Montréal est destiné uniquement à la desserte domestique. Néanmoins, nous sommes au service des citoyens et souhaitons répondre à la demande du public. Dans l’éventualité où la population en vient à exiger une desserte internationale ou transfrontalière au MET, nous pourrons l’examiner. Toutefois, il y a certaines conditions pour le faire. D’abord, ADM détient un monopole sur les vols internationaux qui ne nous permet pas d’offrir une desserte internationale. Ensuite, l’acceptabilité sociale et le soutien de la communauté doivent être au rendez-vous. »

En parlant du MET

Nos recherches du côté du MET nous ont également amené à découvrir ceci : dans un article publié il y a un an et portant sur le projet de construction de la nouvelle aérogare de l’Aéroport Montréal Saint-Hubert, la plateforme La Relève soulignait ceci :

« la direction (du MET, NDLR) a fait savoir récemment que les gros porteurs pouvant accueillir plus de 230 passagers ne pourront atterrir à l’aéroport. »

L’argument du bruit à St-Hubert : appelé à disparaître?

Restons dans l’acceptabilité sociale, et plongeons sous cet angle :

toute personne qui a suivi, jusqu’à maintenant, le développement du MET, a forcément entendu parler des réactions amères de la population qui habite le secteur de l’aéroport.

Les habitants autour de l’aéroport de St-Hubert manifestent depuis longtemps leur colère et inquiétude à l’égard du bruit des avions qui décollent et atterrissent à côté de leur table de chevet.

Mais voilà que « la direction a annoncé en février (2023) que Porter Airlines (grand partenaire du MET dans la construction, actuellement en cours, d’un grand terminal au MET – NDLR) sera la première compagnie aérienne majeure à desservir ses vols à partir de Saint-Hubert et qu’elle utilisera des avions de modèle Embraer E195-E2, soit l’avion le plus silencieux et le plus écoénergétique sur le marché à l’heure actuelle » peut-on lire également ici.

Les décibels de malheur sont-ils en train de baisser le volume?

Toujours dans la filière bruit, Chrono Aviation, qui loge au MET, est lui aussi en train de mettre le cap sur des avions silencieux :

En avril dernier, alors qu’on annonçait que la compagnie avait fait l’acquisition d’un Boeing 737-800, soit le plus récent appareil de sa flotte, Chrono Aviation, dans ses allocutions racontant que la compagnie « profite du renouvellement de sa flotte et de l’arrivée du nouveau Boeing 737-800 NG pour développer de nouveaux marchés », on apprenait également ceci :

« Un changement s’imposait à la suite des nouvelles règles sur le bruit à l’aéroport MET, et le Boeing 737-800 est selon nous un choix porté sur l’avenir » déclarait Dany Gagnon, vp de Chrono Aviation.

Mécontentements des usagers, avions et pax, à YUL

Retournons à YUL, pour conclure avec ceci :

À la grogne qui voyage dans les bagages de nombreux usagers – à l’égard des installations aéroportuaires de YUL, souvent jugées contraignantes – non seulement la population peut-elle, mais est-elle en droit d’espérer des améliorations.

Car tel que stipulé dans ses responsabilités, ADM est tenu à ceci :

« Chaque année, ADM doit en outre investir pour maintenir ses installations en bon état et les développer en fonction des besoins de la clientèle, passagers et transporteurs, et de la collectivité montréalaise. »

Dossier à suivre.

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Isabelle Chagnon
Détentrice d’un baccalauréat en journalisme de l’Université Laval, Isabelle débute sa carrière de journaliste en voyage en 1995. Ses articles et reportages ont voyagé dans les magazines L’agent de voyages, Voyager et Tourisme Plus, Atmosphère d’Air Transat et le Journal Le Devoir, entre autres. Elle est co-autrice de quatre guides chez Rudel Médias (25 destinations soleil pour les vacances) et aux Éditions Ulysse (Voyager avec des enfants, Fabuleux Alaska/Yukon, Longs séjours à l’étranger). Depuis 2006 aussi, elle présente des conférences devant public.