Le voyage de demain : 4 chefs d’entreprise partagent prédictions et conditions essentielles

Photo: Business Traveller

Le Forum Économique Mondial a récemment demandé à quatre chefs d’entreprise du secteur du voyage de se prononcer sur ce que la reprise des voyages va nous annoncer, selon eux, en matière de tendances, les leçons à tirer de la pandémie et quelles sont les conditions essentielles au succès futur des entreprises et des destinations de voyage et de tourisme.

Open Jaw Québec a parcouru le compte-rendu et résume ici les grandes lignes.

Capacité d’adaptation

On souligne d’emblée que parmi les facteurs qui détermineront grandement la performance du secteur, il y a les préférences des consommateurs, bien entendu, mais également la capacité d’adaptation des entreprises et des destinations.

« Dans le même temps, le secteur devra se préparer aux chocs futurs » nous informe-t-on.

Marriott International, Tony Capuano, pdg :

« Notre façon de vivre et de travailler a changé à cause de la pandémie et notre façon de voyager a également changé. »

Monsieur Capuano confirme d’abord ce qu’on ressent en ce moment : l’avenir s’annonce prometteur pour les voyages et le tourisme et, partout dans le monde, les gens reprennent la route.

Avec cette reprise, « de nouvelles catégories de voyages sont apparues. L’essor des voyages « bleisure » ​​en est un exemple, combinant des éléments de voyage d’affaires et de loisirs en un seul voyage. Les nouvelles modalités de travail flexibles, y compris la possibilité pour de nombreux travailleurs de travailler à distance, ont créé des possibilités de déplacements prolongés, non limités par une semaine de travail de « 9 à 5 » du lundi au vendredi.

« Pour tirer parti de cette demande renouvelée et croissante de nouvelles expériences de voyage, l’industrie doit se joindre aux gouvernements et aux décideurs politiques pour s’assurer que les bonnes conditions sont en place pour accueillir les voyageurs.

Coordination mondiale : la clé

« Dans la perspective des futurs défis du secteur, qu’il s’agisse des conditions de santé publique, des crises internationales ou des impacts climatiques, la coordination mondiale sera l’élément essentiel pour s’attaquer de front à des circonstances difficiles. Un accord international sur des normes communes – ou du moins compatibles – et des cadres décisionnels concernant les voyages dans le monde est essentiel. »

ANA Holdings Inc., Shinya Katanozaka, directeur représentant et président :

« Le secteur des voyages et du tourisme ne pourra pas survivre s’il ne s’adapte pas au marché virtuel et aux voyageurs soucieux de la durabilité. »

Monsieur Katanozaka note pour sa part que « le plus grand changement a été dans le concept même du voyage ».

Il cite en exemple l’expansion rapide du marché des voyages virtuels : « cette tendance a été accélérée non seulement par les progrès des technologies numériques, mais aussi par la pandémie prolongée. »

Il reconnait que de passer du « réel » au « virtuel », ce n’est pas aussi simple. « Les expériences virtuelles reviendront à une redécouverte de la valeur des expériences réelles. Et au-delà, à une soif d’expériences réelles aux finalités plus claires et plus diverses. L’espoir est que cette rencontre du virtuel et du réel apportera équilibre et synergie à l’industrie. »

Mais aussi : « la pandémie a également vu l’émergence du voyageur soucieux de la durabilité, ce qui signifie que les industries (aéronautique et autres) sont désormais confrontées au défi d’ajouter la décarbonisation à leur valeur.

« Cette tendance forcera un réexamen de ce à quoi les voyages eux-mêmes devraient ressembler et de la manière dont les pratiques durables peuvent être intégrées et communiquées. Relever ce défi nécessitera également une collaboration plus étroite dans l’ensemble de l’industrie. »

JLL Hotels & Hospitality, Gilda Perez-Alvarado, pdg mondial:

« L’industrie du tourisme doit plaider pour une meilleure protection des petites entreprises »

« Au cours des prochaines années, je pense que les pratiques de durabilité deviendront plus répandues à mesure que les voyageurs deviendront à la fois plus conscients et intéressés par ce que font les pays, les destinations et les régions dans le domaine de la durabilité. Les deux éléments environnementaux de base, tels que l’eau et l’air, et une approche générale de la durabilité vont être importants. »

« De plus, je pense que la conservation devient plus importante en termes de la façon dont les destinations et les pays expliquent ce qu’ils font, car l’importance du changement climatique et des ressources naturelles va être critique et devenir une priorité pour les voyageurs. »

Madame Perez-Alvarado a également souligné une tendance remarquée au plus fort de la pandémie : un intérêt plus grand pour les événements en plein air, « car cela crée ce genre de distanciation sociale naturelle, une sécurité naturelle. Faire des activités de plein air telles que des repas en plein air, des randonnées et des festivals peut être une alternative plus attrayante aux événements et espaces surpeuplés.

L’importance des petites entreprises

« Beaucoup de leçons ont été apprises au cours des dernières années, mais l’une des plus importantes a été l’importance des petites entreprises. En tant qu’industrie, nous devons mieux protéger les petites entreprises. Nous avons besoin de programmes qui les aident à traverser des périodes difficiles.

« Malheureusement, pendant la pandémie, nombreuses sont celles qui ont fermé leurs portes et pourraient ne jamais revenir. Elles sont importantes pour le secteur car elles apportent un caractère unique aux destinations. Les gens ne voyagent pas pour visiter les mêmes endroits qu’ils pourraient visiter chez eux; ils préfèrent les expériences uniques qui sont proposées par des entreprises spécifiques. Si vous deviez supprimer toutes les petites entreprises d’une destination, ce serait une expérience très différente. »

Tripadvisor, Steve Kaufer, co-fondateur et pdg:

« Les données montrent que la majorité des voyageurs souhaitent explorer les destinations de manière plus immersive et expérientielle »

Monsieur Kaufer entrevoit le futur du voyage de cette manière : « les entreprises doivent reconnaître le désir continu de se sentir en sécurité », en ajoutant qu’une enquête de Tripadvisor a révélé que les trois quarts (76 %) des voyageurs choisiront toujours, dorénavant et selon l’enquête, leur destination en fonction des faibles taux d’infection.

Il est catégorique : « les efforts visant à montrer comment les entreprises prennent soin des voyageurs – au niveau sanitaire – doivent être ancrés, à l’avenir, dans les opérations touristiques.

« Mais les voyages évolueront également d’autres manières, et en tant qu’industrie, nous devons être prêts à penser numériquement et à réinventer notre utilisation de l’espace physique.

« Les hôtels deviendront des lieux de rencontre dynamiques permettant à des groupes de se lier dans un nouveau style de travail hybride. Les hébergements situés à proximité des principaux sièges sociaux bénéficieront d’un afflux de réservations d’employés se réunissant pour de plus longues périodes.

« Ils laisseront également place au voyageur « bleisure » qui mêle voyages d’affaires et loisirs. Les employeurs doivent se préparer à ce que leurs travailleurs dédient quelques jours supplémentaires pour se reposer et se détendre après les réunions d’entreprise sur place. »

Il précise sa pensée sur le voyageur loisir ainsi : « les voyageurs voudront explorer le monde différemment. Alors que voir le sommet de l’Empire State Building a été une excursion typique pour les touristes à New York, les visiteurs seront plus attirés par des activités intimes comme suivre un cours de cuisine à Brooklyn avec une famille de pizzaïolo qui remonte à des générations. Ce sera sans aucun doute un domaine de croissance important dans l’industrie.

« Les gouvernements seraient également avisés de planifier et d’envisager un manuel international qui nous aide à nous préparer à la prochaine crise de santé publique, y compris des passeports universels pour les vaccins et des politiques qui nous permettent de traverser plus rapidement les frontières.

« Comprendre ces tendances clés – le besoin permanent de se sentir en sécurité et le désir croissant de voyager différemment – et planifier la prochaine crise seront essentiels pour que les gouvernements, les destinations et les entreprises touristiques réussissent dans leurs efforts pour continuer à voyager dans le monde. »

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Détentrice d’un baccalauréat en journalisme de l’Université Laval, Isabelle débute sa carrière de journaliste en voyage en 1995. Ses articles et reportages ont voyagé dans les magazines L’agent de voyages, Voyager et Tourisme Plus, Atmosphère d’Air Transat et le Journal Le Devoir, entre autres. Elle est co-autrice de quatre guides chez Rudel Médias (25 destinations soleil pour les vacances) et aux Éditions Ulysse (Voyager avec des enfants, Fabuleux Alaska/Yukon, Longs séjours à l’étranger). Depuis 2006 aussi, elle présente des conférences devant public.