Enjeux actuels du secteur aérien, expliqués par Air Canada, Sunwing et Transat

Le chaos aérien de l’hiver 2023 a laissé des séquelles encore perceptibles aujourd’hui. L’heure n’est plus aux excuses. Mais plutôt : et si on expliquait comment ça marche, la mise en chantier des horaires de vols?

Et pendant qu’on y est : pourquoi tout a capoté l’hiver dernier? Et quels sont les enjeux actuellement?

Parce qu’on peut mieux expliquer les choses quand on sait comment elles fonctionnent, Open Jaw Québec vous offre ici un résumé d’explications présentées par Air Canada, Air Transat et Sunwing, alors qu’ils étaient réunis pour discuter notamment de ce sujet, au Sommet de l’ACTA, chapitre Québec, en septembre dernier.

En coulisses chez Air Canada

Les enjeux de l’an dernier et d’aujourd’hui, expliqués par Vincent Gauthier-Doré, directeur général et des Ventes, Amérique du Nord, chez Air Canada :

« Après la Covid, on a fait face à une situation difficile au Canada parce que la reprise du voyage s’est faite tout d’un coup! C’est tout l’écosystème qui n’était pas prêt à ça.

Développer des horaires de vols, c’est un exercice qui commence deux ans à l’avance. Puis, un an avant, on fait une révision basée sur nos meilleures connaissances de la flotte et des équipages qui vont être disponibles.

Cette année, et ça va continuer pour encore un certain temps, l’industrie au complet fait face à deux grands enjeux.

Le 1er : la disponibilité des pilotes. Il manque beaucoup de pilotes en ce moment et il y a une compétition internationale pour aller chercher les pilotes en service.

Si bien qu’on voit des situations qu’on ne voyait pas avant, comme les compensations aux pilotes qui ont beaucoup augmenté, et particulièrement aux É-U. Et pour la première fois, on voit des pilotes étrangers faire voler des avions aux É-U.

Le 2ème : il y a un manque de pièces d’avion dans le monde, des moteurs en particulier. C’est un problème qui est global.

L’impact de tout ça chez Air Canada se manifeste en particulier chez notre flotte régionale. Car les pilotes des compagnies régionales vont vers les plus grandes compagnies, pour travailler sur de plus gros avions vers des destinations plus intéressantes. Et les salaires sont en conséquence.

Cela dit, on ne peut donc pas faire voler tous nos avions régionaux et le résultat, on utilise notre flotte principale pour couvrir certaines de ces destinations régionales. Conséquence : au cours de la dernière année, on a dû réduire notre voilure sur certaines origines et certaines destinations. »

Réduire la voilure, un exercice stratégique

Monsieur Gauthier-Doré poursuit :

« Quand on doit réduire cette voilure, notre focus, c’est de le faire sur des routes aériennes où on a un moyen de réacheminer ou ré-accommoder les passagers qui sont affectés. Et dans 90 % des cas, on est capable de le faire.

Par exemple, si on devait annuler un vol sur Francfort, bien on pourrait ré-accommoder les passagers via Zurich. »

En coulisses chez Air Transat

Les enjeux d’aujourd’hui, expliqués par Julie Sareault, directrice commerciale chez Transat Distribution :

« Bâtir un calendrier de vols, ça comporte son lot de risques. On est tributaires de plusieurs facteurs. On essaye de déployer longtemps d’avance une capacité qui va être réaliste.

On observe les tendances et les réservations, et dans le contexte actuel, si on a à apporter des modifications importantes, on les fait au moins dans les 9 mois avant le départ, pour justement donner l’occasion au réseau de s’ajuster et réagir. »

Pour l’hiver qui s’en vient…

Madame Sareault poursuit :

« Pour cet hiver, la capacité déployée est celle qui se trouve actuellement dans le système et qui devrait techniquement rester. Cela dit, est-ce qu’il y aura des petites modifications? C’est fort probable. Il faut être à l’affut de ça. Mais on essaye toujours de ne pas secouer dans une grande mesure.

Je pense qu’on peut se consoler en se disant que durant la dernière année, l’industrie s’est montrée beaucoup plus stable. Et on a beaucoup appris avec ce qui s’est passé dans le passé. Si on peut mieux prévoir pour l’avenir, il est certain, toutefois, qu’il y a et aura toujours des fluctuations dans les horaires des vols. »

En coulisses chez Sunwing Airlines

Les enjeux de l’an dernier et d’aujourd’hui, expliqués par Lyne Chayer, directrice générale de Vacances Sunwing :

« Les horaires des vols sont construits parfois des années à l’avance. Mais il y a toutes sortes d’imprévus qui surviennent. Et ça peut ressembler à ceci : un atterrissage d’urgence en raison d’un passager perturbateur, dans un aéroport qui n’était pas prévu, 3 heures d’attente pour avoir accès à une gate, une heure d’attente pour obtenir l’autorisation pour pouvoir débarquer le passager perturbateur, etc.

Et chaque retard a un effet domino sur les vols suivants. Alors il faut être indulgent.

Ceci étant dit, tout comme pour les départs d’une croisière, réserver, par exemple, un mariage le lendemain de l’arrivée prévue à destination, n’est sans doute plus une bonne idée dorénavant.

Dans le même ordre d’idées, je suggère aux conseillers de ne plus réserver un retour de vacances à un client qui concorde avec la veille d’un départ de voyage d’affaires pour ce même client. »

Pour l’hiver qui s’en vient…

Madame Chayer poursuit :

« Pour l’hiver qui s’en vient, on a fait énormément de travail sur la planification, l’embauche, la formation et sur le « se laisser de l’espace » pour le « en cas d’urgence » – et ça, aucune ligne aérienne au monde aime ça! C’est de l’argent qu’on laisse au sol.

Mais le but dans tout ça, c’est d’avoir le moins d’impact possible, le moins de perturbation possible sur le voyage des passagers, sur vos réservations et commissions et sur nos opérations.

Par ailleurs, ce qui se passe à l’aéroport peut aussi avoir un impact sur une ligne aérienne. Par exemple, nous avons ajouté des bornes d’enregistrement, mais c’est de la technologie, et ça ne fonctionne pas toujours comme on voudrait.

Parfois, le voyageur doit retourner au comptoir, où il manque encore de personnel. Et c’est du temps supplémentaire au circuit du voyageur. Et c’est sans parler du passage de la sécurité et des douanes. Bref, plein de petits détails qui ont aussi un impact sur une ligne aérienne. »

La cueillette de ces informations a été rendue possible dans le cadre du récent Sommet de l’ACTA, chapitre Québec, qui s’est tenu à Laval en septembre dernier.

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Détentrice d’un baccalauréat en journalisme de l’Université Laval, Isabelle débute sa carrière de journaliste en voyage en 1995. Ses articles et reportages ont voyagé dans les magazines L’agent de voyages, Voyager et Tourisme Plus, Atmosphère d’Air Transat et le Journal Le Devoir, entre autres. Elle est co-autrice de quatre guides chez Rudel Médias (25 destinations soleil pour les vacances) et aux Éditions Ulysse (Voyager avec des enfants, Fabuleux Alaska/Yukon, Longs séjours à l’étranger). Depuis 2006 aussi, elle présente des conférences devant public.